Musique hébraïque

Publié le 1 Mars 2008

L'histoire de la musique juive et des... Juifs est étroitement liée. Ils s'enracinent tous deux en terre d'Israël, puis se dispersent en Orient et en Occident, au gré des événements, en emportant leurs traditions culturelles et religieuses, ainsi que leurs musiques.L'interaction entre les peuples des différents pays et les communautés juives donne naissance à une forme d'expression culturelle particulièrement riche. En effet, les musiciens juifs introduisent les éléments mélodiques, les rythmiques et les variations des courants musicaux de leurs terres d'accueil. Si la musique juive se caractérise par sa diversité culturelle, elle présente un caractère d'unicité qui réside dans la manière dont ces musiciens ont intégré dans la musique traditionnelle les influences des autres cultures musicales. L'héritage musical hébraïque s'étale sur une période de près de trois mille ans d'histoire et  constitue une impressionnante variétée. De nombreuses cultures musicales sont à l'arrière-plan de l'évolution de cette musique comme celle des civilisations antiques et helléniques à l'époque des patriarches et des Temples et celles de tous les pays de la diaspora pendant environ deux mille ans de dispersion. Les savants qui se sont attachés à la musique juive à partir du XIXe siècle ont longtemps fait œuvre d'historiens. Ils ont retracé l'émergence et l'évolution des cadres et des formes de la liturgie, celles aussi des répertoires paraliturgiques. Ils ont établi les quatre grandes périodes qui rythment l'évolution de la musique juive : celle pendant laquelle le service religieux ne repose pas sur des ensembles textuels et musicaux rigoureusement constitués ; celle qui, s'étendant des débuts de l'ère chrétienne à la fin du 1er millénaire, connaît au contraire une formalisation des versants textuel et musical en même temps que leur forte articulation ; celle où se constituent véritablement les styles régionaux ; celle enfin qui, à partir du XVIIIe siècle, voit éclore la musique religieuse savante et se développer l'harmonisation des airs religieux, plus réelle dans certaines régions d'Europe que dans d'autres. (source)


Les traditions vocales des trois religions monothéistes sont apparues comme des stratifications de modèles archaïques desquels dériveraient aussi les chants des répertoires profanes respectifs. Cette perspective renvoie à la question plus générale ; existe-t-il une musique hébraïque, chrétienne, musulmane ? Dans la tentative de réponse à la question se reflètent, directement ou indirectement, les problématiques relatives à l'identification des dénominateurs communs des cultures musicales méditerranéennes.


La particularité de l'histoire des traditions musicales hébraïques peut être prise comme modèle pour expliquer la complexité des interactions internes diachroniques et synchroniques entre les principaux centres de formation et de création artistique euro-méditerranéen. La dispersion des juifs, la diaspora, et la vie des communautés dans les différents lieux d'accueil à répandu à travers toute la Méditerranée un patrimoine poétique et musical qui a vécu en osmose avec les traditions et les systèmes musicaux d'autres cultures et communautés. Le chansonnier séfarade, des juifs d'origine ibérique expulsé par la Reconquista, est un des prototypes méditerranéen par excellence.[1]


La musique juive : une musique religieuse et laïque a la fois

À n'en point douter, il existait une musique hébraïque. Mais on n'a que très peu d'informations à disposition, parfois douteuses. On travaille sur trois types de sources : la Bible, la tradition rabbinique et quelques témoignages archéologiques, essentiellement iconographiques. Il faut se garder du danger de considérer la musique de l'Ancien Testament avec un regard chrétien : la musique de Moïse n'est pas celle de Bach[2]. Il faut donc avant tout replacer cette musique dans son contexte de naissance et d'exécution, à savoir dans le Proche-Orient. C'est une musique païenne, qui a été introduite dans la liturgie hébraïque, puis chrétienne.


A l'origine de la musique sacrée nous trouvons l'exhortation du psaume 150 : Louez-le par l'éclat du cor ; louez-le par la harpe et la cithare ; louez-le par la danse et le tambour ; louez-le par les cordes et les flûtes ; louez-le par les cymbales sonores ; louez-le par les cymbales triomphantes, Et que tout être vivant chante louange au Seigneur ![3] [4][5]

 



La musique juive peut être à la fois religieuse et séculière. Cela dépend de son contenu et de sa fonction.

Religieuse : Musique dédié au culte à la synagogue : correspond a l’art du chanteur (le Hazan) qui utilise des méthodes, des mélodies spécifiques et l’art du chant " biblique ".

laïque : Musique jouée pour certains évènements de la vie courante : mariages, bar mitzvas …

Instruments et voix sont utilisées dans cette musique. Elle peut être très rythmées et avoir des textes populaires et même romantiques. On pourrait inclure dans cette catégorie toute la musique juive folklorique et populaire dont le contexte serait extérieur au contexte religieux.

 

 

Les instruments se classent en trois groupes. Les instruments à cordes étaient destinés à la musique sacrée. Le plus caractéristique était le kinnor, ou lyre, instrument traditionnel de l'époque du roi David. Il a existé d'autres instruments à cordes, comme le nevel, une sorte de harpe, et l'asor, une sorte de cithare. Des instruments tels que l'uggab, ou harpe, et le halil, instrument à anche de la famille du hautbois, ainsi que les msiltayim, ou cymbales, les tambours, comme le tof ou tambour sur cadre joué par les femmes, et le pa'amon, sorte de carillon, ont eu un usage populaire. La hasora, ou trompette, et le shofar, corne de bélier ou de bouquetin, ont été des instruments rituels en usage au Temple et joués exclusivement par les prêtres. Le shofar joue aujourd'hui encore un rôle dans la liturgie de Yom Kippour.


 


Origines

On connaissait peu de choses sur les origines lointaines de cette musique, grâce aux découvertes de S. Haik Ventura, qui est arrivée à déchiffrer les signes inscrits sur les manuscrits des Bibles hébraïques[6], par la suites des études ont permis la reconstitution de la gamme musicale hébraïque à 8 sons.[7]

S. Haik Ventura a pu retrouver la composante musicale sur laquelle se chantaient tous les textes bibliques, en constatant que la mélodie suivait le sens des mots, donnait un relief au texte pour l'enrichir. Cette cantilation[8]. Les chœurs exécutaient, probablement à l’unisson, la même mélodie sacrée, d'une composition simple, divisée en une partie masculine et une partie féminine, chantée à l'octave supérieure. est très ancienne et remonte à l'époque de l’Exode


Le peuple juif et sa musique s'enracinent au Moyen Orient , particulièrement en Israël et s’étend un peu partout. Les juifs vécurent pendant plus de 2000 ans parmi des cultures à la fois occidentales et orientales. Cependant, il existe une propriété unique à cette musique. Une propriété qui défie la géographie et que l’on pourrait désigner comme une synthèse inter-culturelle.



Le Klezmer

La musique originaire d’Europe de l’Est et qui s’est étendue vers l ‘ Ouest et le Nord à travers l’Europe puis vers l’Afrique du Nord appartient à la tradition ashkénaze. Elle comprend la musique Klezmer qui constitue une tradition musicale des Juifs ashkénazes (d'Europe centrale et de l'Est). Elle s'est développée à partir du XVe siècle, ses origines - discutées et dépourvues de sources documentaires d'époque - seraient les musiques du Moyen Orient et de Turquie (héritage originel des Ashkénazes descendants des Hébreux en royaume d'Israel), ainsi que les musiques d'Europe centrale et d'Europe de l'Est (Slaves et Tziganes).

Le mot klezmer vient de l'association des mots klei et zemer, instrument de chant. À l'origine le mot klezmerklezmorim) désignait donc les instruments. Le sens a glissé et on a également appelé les interprètes les klezmorim ; du fait des conditions de vie précaires de ces musiciens itinérants, ce mot pouvait avoir un aspect péjoratif. (pluriel :

En raison de ses origines, la langue de prédilection de la chanson klezmer est le yiddish, mais les langues locales étaient aussi utilisées.



Musiques judéo-espagnoles

Ce courant se réfère à la musique originaire des alentours de la méditerranée, de l’Espagne, de l’Afrique du nord, à la Turquie et à la Grèce. " Sépharade " signifie "espagnol" en Hébreu et fait allusion au fait que jusqu’à l’expulsion de tous les non chrétiens en 1492, une culture juive très florissante existait en Espagne. Lorsque ces communautés juives émigrèrent autour du bassin méditerranéen, ils emportèrent avec eux une forme particulière de la la langue espagnole appelé Ladino ou judéo espagnol. La chanson profane est souvent rapportée par les femmes, et les chants liturgique par les hommes. Les formes musicales de ce chansonnier sont simples et populaires, souvent deux, trois, quatre strophes et un refrain. Ce sont d'anciennes mélodies issues de la tradition orale, répandues par les chanteurs de cour, les poètes ; elles célèbrent toutes les étapes de la vie, la naissance, l'enfance, la jeunesse, les mariages, la vie amoureuse, la mort. A travers elles, se distillent conseils et mises en garde.Après la période de l'Inquisition et à la fin du XVe siècle, près des 200 000 Juifs qui refusent la conversion au catholicisme sont expulsés d'Espagne. Ils s'exilent vers le Portugal, l'Afrique du Nord, la Turquie et la Grèce en emportant avec eux le Judéo-Espagnol, une forme de la langue espagnole utilisée et adaptée par les Sefardim et le Ladino, la langue liturgique. Par extension la musique séfarade concerne donc les communautés juives du bassin méditerranéen. La musique et les chants séfarades, romansas et kantikas composent le répertoire " Cancionero " qui s'enracine dans le Moyen-Age et se transmet depuis, de génération en génération. La mémoire judéo-espagnole est imprégnée de la richesse de ce répertoire qui connaît une évolution constante au cours de l'histoire et inspire encore de nos jours de nombreux artistes et musiciens. 


 


Musiques judéo-arabes

Ce ne sera que dans les périodes politiquement stables et économiquement fastes où l'Islam devient une source d'inspiration libre pour les arts et la philosophie que les juifs séfarades seront respectés et contribueront largement à l'essor culturel et économique de le civilisation musulmane. Pendant plus de 1000 ans, au delà des considérations politiques et religieuses, arabes et juifs séfarades vont vivrent côte à côte partageant un socle commun culturel (les mêmes langues, la même cuisine, la même musique)

Ces musiques hébraïques sont des dérivés populaires de la nouba, et commencent toujours de la même façon : en longues vocalises à la nostalgie poignante sur fond de très légères cordes et percussions. Puis tout s'emballe en une formidable fête d'arabesques ornementées.


 



A la chute de l'empire Ottoman et à la création de l'Etat d'Israël, le renouveau nationaliste et populiste arabe incarné par Nasser sera moins favorabe envers les communautés juives encore présentent dans ces pays.

 

Au Maroc

 

Les juifs étaient intégrés au tissu culturel du Maroc rural, ils avaient des coutumes communes avec leurs voisins musulmans : l'habillement, la nourriture, la « vénération de saints hommes et, à l'occasion, de saintes femmes, ainsi que les rythmes et les modes de la vie quotidienne. Les liens sociaux et économiques entre les juifs et les musulmans dans les régions de culture berbère étaient très étroits, bien que chaque groupe ait aussi gardé des traits culturels distincts et des limites religieuses très strictes. Alors que dans toutes ces régions les juifs parlaient « berbère, car d'aussi loin que les gens se souviennent, ils parlaient l'arabe « vernaculaire (avec des tournures spécifiquement juives) dans la plupart des mellahs, comme leur langue maternelle. Ils écrivaient en judéo-arabe, employant « des caractères hébraïques pour transcrire leur parler marocain. Bien que la nourriture consommée par les juifs ressemblât beaucoup à celle des musulmans, leurs lois alimentaires leur interdisaient de consommer des repas préparés dans « des maisons non juives. Par ailleurs, ils pouvaient manger des œufs, des olives, du « miel, de l'huile ou des produits laitiers chez leurs voisins. Alors que les costumes des juifs et des musulmans paraissaient très semblables, un examen approfondi « révélait presque toujours des signes distinctifs chez les juifs, qu'il s'agisse de la « couleur du vêtement du dessus ou bien de la sorte de coiffe portée par les femmes « et par les hommes. La loi islamique stipulait que les dhimmis devaient porter un vêtement les distinguant des musulmans (et leur interdisait par exemple le port d'un turban), mais dans le pays berbère, les traits distinctifs permettant de reconnaître les juifs relevaient davantage de la coutume que de l'exigence légale   (Daniel Schroeter).


 

 


Au xixe siècle, des tentatives de réforme liturgique ont lieu. L'un des principaux réformateurs est Salomon Sulzer, premier chantre de la communauté juive viennoise et compositeur. Il tente d'instaurer un culte organisé selon certaines règles précises, inspirées du caractère oriental de la musique hébraïque traditionnelle, mais adaptées aux conventions occidentales.


Au xxe siècle, des compositeurs juifs européens et américains, dont Ernest Bloch et Darius Milhaud, créent des compositions à la fois orchestrales et chorales destinées à la synagogue. D'autres compositeurs incorporent des airs de prières et des mélodies folkloriques typiquement juifs dans leurs créations musicales, comme l'Américain Leonard Bernstein dans sa symphonie Kaddish (1961-1963).


Steve Reich combine les techniques du minimalisme et un langage mélodique empreint de musique traditionnelle juive dans Tehilim (1981), ensemble de trois psaumes. D'autres compositeurs juifs abordent au contraire des thèmes juifs dans un langage musical entièrement occidental. C'est le cas d'Arnold Schoenberg dans l'opéra Moses und Aron (1930-1932) et Aaron Copland dans son trio pour piano Vitebsk (1927).


En Israël, les chansons folkloriques de la communauté juive d'Orient, réminiscences de la musique arabe, mêlent des éléments de cette dernière avec les chants juifs européens. La musique israélienne, souvent originale, a ainsi su unifier les éléments orientaux traditionnels avec la musique occidentale contemporaine.


Le sort de la musique arabe en Israël pourrait susciter de sérieux doutes parmi les musiciens qui ne connaissent pas assez l'aspect culturel de ce pays, ou sa musique en général, ou celle de sa population arabe en particulier. Le fait est qu'il existe ici, dans le domaine de la culture musicale arabe, des conditions bien différentes de celles des pays voisins essentiellement arabes, ce qui entraine des conséquences pour la préservation et la rénovation de la musique arabe.

 

Sur le plan démographique, la population arabe en Israël constitue une minorité (I2 % environ de l'ensemble de la population), comprenant, d'une part, des musulmans, des chrétiens, et leur parents les druzes, d'autre part, des bédouins mi-nomades et des villageois-les deux groupes vivant dans un milieu plus ou moins arabe-et des citadins qui, par contre, sont mêlés a la population juive des grandes villes.

 

Signalons, des l'abord, que la formation musicale de l'oreille des Arabes d'Israël est nettement arabe. On peut facilement identifier un Arabe par l'intonation de certaines successions mélodiques, par l'intonation d'une phrase classiquement modulante (à la Mozart, par exemple) ou d'une succession chromatique-de la gamme tempérée, bien entendu-ou même par l'intonation de certains intervalles ou sons isoles, comme la sensible dans une gamme majeurs.

 

En plus, Israël compte parmi sa population juive un apport considérable d'immigrants originaires de différents pays arabes, de formation culturelle arabe, ayant un patrimoine musical spécifiquement arabe, et chez lesquels la mélopée arabe imprégnée sensiblement et les prières juives et la cantillation de la Bible. Souvent c'est la musique arabe que ces immigrants goutent avec le plus de plaisir et c'est à elle que va leur faveur.

 

La Radiodiffusion israélienne (Kol Israel) possède et entretient une section de musique arabe dirigée par l'expert M.Azouri.


Notes

  1. Paolo Scarnecchia, Musique populaire, musique savante, Encyclopédie de la méditerranée, Série Temps Présent, Edisud, 2003
  2. Une telle formulation semble évidente, mais on lit parfois de drôles de choses...
  3. Le Psaume n'est pas une doxologie, il fait partie des Psaumes alléluiatiques et date du temps de Néhémie. C'est une louange universelle de Dieu, composée par un musicien.
  4. La traduction de ce texte pose un certain nombre de problèmes qui touchent à une discipline qui m'intéresse tout particulièrement : la musique dans l'Antiquité. Dans ce domaine, le problème est double : il est tout d'abord difficile de parler de la musique avec des mots. Nombre d'écrivains se sont heurtés à ce problème : Balzac dans Gambara et dans Massimila Doni, George Sand dans Consuelo, Proust dans sa Recherche... Alors que faire quand cette musique date de plus de 2000 ans ? Comment avoir la moindre idée d'un son quand on sait les divergences d'interprétation qui règnent entre les archéologues pour l'interprétation d'un tas de cailloux ?
  5. La musique dans la Bible. Tentative d'exégèse du Psaume 150
  6. En Genèse 4.21, il est écrit que : Youbal fut l’ancêtre de tous ceux qui jouent de la harpe et du chalumeau. Ainsi, la Bible donne à la musique une place importante dans les activités humaines, au même titre que l’agriculture et l’artisanat
  7. ou échelle lydienne
  8. Les signes de cantillation formalisent le chant rituel de la Bible. Techniquement, c'est plus une forme de prononciation et d'élocution que de la mélodie, bien qu'elle ne soit pas absente de l'exercice. C'est pourquoi les juifs (comme les musulmans) parlent de récitation et de lecture, comme pour un hymne métrique

Liens internet

La musique juive : aux origines - Une sélection de textes de Léon Algazi et de Hervé Roten




Texte de Mario Scolas

 


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Rédigé par Mario Scolas

Publié dans #Musiques du monde

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