Salah El Mahdi
Publié le 13 Avril 2008
Salah El Mehdi (صالح المهدي), de son vrai nom Mohamed Salah Ben Abderrahmane Ibn Mehdi Chérif[1] né le 9 février 1925 à Tunis, est un musicien, un pédagogue et un musicologue tunisien. Il figure comme l’un des grands maîtres de la Musique tunisienne. Il a formé de nombreux jeunes talents qui sont devenus de célèbres musiciens. Il enseigne le solfège, le chant ou l’histoire de la musique, de composer et de jouer de nombreux instruments. Il était aussi le plus grand joueur de nay de Tunisie.
Biographie et évolution musicale
Jeunesse
Son père étant professeur de musique, son domicile sert de lieu de rencontres aux meilleurs musiciens tunisiens et étrangers. C'est ainsi qu'il acquiert dès son plus jeune âge différents modes et rythmes des pays arabes qu'il exécute avec le petit instrument qu'il a fabriqué (mélange de oud et de violon).
Tout en poursuivant ses études primaires, il suit des cours de musique orientale donnés à La Rachidia par les musicologues Ali Derwich et Khemaïs Tarnane. Il s'intéresse et s'enrichit de la musique occidentale grâce à un professeur italien.
Il devient par la suite l'un des meilleurs flûtistes du monde arabe et exerce son talent à la radio puis en public tout en poursuivant ses études secondaires puis supérieures à la section des lettres de l'Université Zitoun puis à la faculté de droit et à l'École nationale d'administration. Il obtient plus tard un doctorat en musicologie et lettres comparées à l'Université de Poitiers.
À l'âge de 18 ans, il devient professeur de musique à La Rachidia et, en 1949, en devient directeur. Compositeur, il est accepté, en 1949, à la SACEM où il atteint le grade de membre définitif. Après la création de la société tunisienne équivalente, il est nommé membre honoris causa de la SACEM.
Serviteur de l'État
En 1951, il est reçu au concours de la magistrature tunisienne et est désigné juge aux tribunaux de Tunis. C'est ainsi qu'il limite momentanément son activité artistique à la composition, sous le pseudonyme du musicien andalous Ziriab tout en assumant la tâche de critique musicale dans plusieurs journaux. Dans le domaine théâtral, il interprète plusieurs rôles avec la troupe de la société El-Kaoukab de Tunis, dont il devient par la suite président, et écrit des pièces pour la radio.
Après l'indépendance de la Tunisie, il est appelé à diriger le service des beaux-arts au ministère de l'éducation nationale où il participe à la création du Conservatoire national de musique, de danse et de théâtre et organise l'enseignement artistique dans les lycées et les collèges. En 1961, il est appelé à diriger, au sein du ministère de la culture, la direction de la musique et des arts populaires avant d'être nommé président du comité culturel national, poste qu'il remplit jusqu'à sa retraite avec la présidence du comité national de musique. Il crée également la Troupe nationale des arts populaires (1962), l'Orchestre symphonique tunisien (1969), la Société nationale de préservation du Coran et l'École nationale de psalmodie du Coran.
Activité internationale
Sur le plan international, il participe à plusieurs congrès dirigés par les institutions dépendant de l'Unesco ou des organisations nationales de divers pays dont le CNRS français et la société d'éducation musicale des États-Unis d'Amérique.
Il devient par la suite membre du :
- comité exécutif de l'Organisation islamique de l'histoire, de la culture et des arts dont le siège est à Istanbul (Turquie)
- haut-comité de la civilisation islamique dont le siège est à Istanbul
- comité exécutif du Conseil international de la musique dont le siège est à l'Unesco.
Il est également vice-président :
- du comité directeur de la Société internationale de l'éducation musicale
- de l'Institut international de musique, danse et théâtre par les moyens audio-visuels
- du Conseil international de musique folklorique
Il est actuellement :
- membre de l'Institut des musiques comparées de Berlin
- président d'honneur de l'Académie inter-arabe de musique
- président de l'Organisation mondiale des arts et traditions populaires qui relève de l'Unesco dont le siège est à Vienne (Autriche)
Héritage
Il a à son actif plus de 600 compositions mêlant chants classiques et populaires, musiques instrumentales orientales et occidentales (noubas, mouachahats, bachrafs et poèmes symphoniques, musique de chambre et pièces de piano, flûtes, violons et harpes) ainsi que des pièces symphoniques. Il participe en 1958 avec succès au concours de la composition de l'hymne national tunisien dont il compose la musique. Ses œuvres symphoniques seront notamment jouées aux festivals de Moscou et de Léningrad.
En 1999, Salah El Mahdi reçoit le prix de l'Académie arabe pour la musique en tant que chercheur en musique.
La majorité des pays arabes a, plus au moins, abandonné la conception traditionnelle de la musique pour le choix du rythme uniquement. De plus, dans ces pays, on ne pense plus à la voix et au chant à proprement parler.
Ce ne sont, en règle générale, que des voix médiocres que l’on essaye de dissimuler derrière de belles images de la nature et les artifices de la technologie sonore. Le visuel occulte le vocal, la technique des studios, la réalité des voix. Mais ce qui est regrettable, c’est que «l’image naturelle» est de plus en plus remplacée par «l’image sensuelle». «l’attraction des corps» sert à fructifier les marchés. On vend des chansons comme on vend des boîtes de conserve. C’est une succession interrompue de marques de fabrique aussitôt nées aussitôt remplacées, dont il ne subsistera plus rien, à jamais.
En Tunisie, le travail accompli dès l’indépendance a permis un meilleur ancrage des générations dans la tradition musicale. Dès les années 60, on avait créé, dans chaque école, des troupes et des chorales dirigées par des professeurs de haut niveau qui incitaient leurs élèves artistes à produire en conformité avec leurs attaches classiques. Des compétitions musicales et vocales étaient aussi organisées à travers toutes les régions et elles avaient, pour la plupart, comme objet le patrimoine musical local, populaire ou autre. (Salah El Mehdi : «c’est de nos chefs-d’œuvre que vient l’inspiration»).
Ses opposants par rapport au Mezoued
Ses opposants lui reprochent malheureusement surtout que durant toute sa vie, il a malheureusement renié la pratique et la reconnaissance du mezoued au point de ne lui accorder aucune origine, aucun repère.
Avec d'autres musicologues tunisiens comme feu Abdelhamid Bel Algia, trop longtemps fonctionnarisé comme chef d’orchestre de la Troupe de la Radio tunisienne, le Dr Salah El Mahdi qui a par exemple toujours soutenu l'interdiction des passages de cet art populaire sur les ondes de la télévision tunisienne, considérant que qu'il s'agissait d'un art populaire mineur de piètre qualité. Surenchérissant de lui dénier encore de nos jours l'étiquette de patrimoine culturel indigne de représenter l’identité nationale tunisienne. Une identité, trop attachée aux aspects arabo-andalous de la musique supposée raffinée, ainsi qu’aux mélopées orientales canonisant de la sorte le genre officiel. imitant la politique adoptée à l'époque au Maroc vis-à-vis des arts populaires marocains considérés comme genres mineurs par apport au genre andalou.
La perception de cette musique populaire par les détenteurs de la culture dominante est très passéiste puisqu’elle considère le « Mezoued » comme une musique « pauvre » au moment même où l'Unesco reconsidère la valeur des particularités et des singularités des expressions populaires.
Références
- ↑ Tahar Melligi, « Dr Salah Mehdi. Juge et maître de la musique tunisienne », La Presse de Tunisie, 24 septembre 2007