Melhoun
Publié le 10 Décembre 2008
"Celui qui ignore la poésie ne connaît pas la route de l'intelligence qui conduit à la sagesse par les degrés de la science et de l'art." - Chanson du Souss.
Un poète n'est donc pas qu'un artiste au sens où l'entendent les gens raisonnables : Il participe de l'histoire de son temps et de son pays, de la famille et de la société qui l'ont modelé sans parvenir à le corrompre, des injustices et des bonheurs de ses contemporains. Un poète se doit sans doute plus encore d'être vivant parmi les vivants. Seuls des enfants immatures peuvent encore se demander si la poésie, si l'art est utile. Je ne puis que répéter cette phrase fameuse du grand Mallarmé que je cite de mémoire : « L'art a pour devoir social de donner une issue aux angoisses de son époque ».(Bernard Bonnejean - Publié dans : C'est quand même peu de choses que de nous -)
Le malhoun serait le chant par lequel les chameliers rythmaient le déhanchement des caravanes pour animer les soirées étoilées autour d'un gîte d'étape. « A ces chants de chameliers, nous dit Ghazali, même les chameaux sont sensibles, au point qu'en les entendant ils oublient le poids de leurs charges et la longueur du voyage et qu'ainsi excités étendent leurs cous n'aillant plus d'oreilles que pour le chanteur : ils sont capable de se tuer à force de courir ». Or nous dit toujours Ghazali, « ces chants de chameliers ne sont rien d'autre que des poèmes pourvus de sons agréables, aswat tayeba et de mélodies mesurées, alhan mawzouna. En effet, cette poésie populaire qu'est le malhoun est aussi un art musical, plus précisément un tarab, cette émotion musicale qui aboutit à l'extase.»
La culture populaire au Maghreb revêt une immense richesse, bien qu'elle fut surtout transmise oralement. Depuis l'ouverture à l'université de Tlemcen (Algérie), d'un troisième cycle spécialisé en "culture populaire", des écrits qui sont surtout des thèses de Magister ou doctorat, sont venus enrichir la connaissance de ce patrimoine poético-musical qu'est le Malhoun qui est la plus élaborée des formes de versification écrite en arabe dialectal.
L'histoire et la géographie du Maghreb ont intéressé un grand nombre d'auteurs étrangers aussi bien que des auteurs arabes. Mais il n'en fut malheureusement pas de même pour le patrimoine populaire et plus particulièrement le melhoun au Maroc. Les écrivains marocains semblent avoir été beaucoup plus attirés par les dictionnaires biographiques, l'hagiographie, le mémoire, les généalogies, et la poésie de cour.
Origine du Malhoune
L'origine du Malhoune ou Melhoun ou Malhun en arabe الملحون est un poème mélodique issu d'une culture authentiquement marocaine, qui remonte au XIIe siècle, et emprunte ses modes à la musique arabo-andalouse en simplifiant ses modes et se développe sous une forme littéraire ne respectant pas la structure grammaticale classique (le Qasida). Il est un imposant corpus de poèmes et de chants véhiculés par une double tradition orale et manuscrite, représentant un art plus élaboré des formes de versification notamment en arabe dialectal.
Les exodes de populations ont eu toujours de grands impacts sur la vie culturelle des sociétés et notamment sur leur production musicale. Ces impacts peuvent aussi revêtir la forme d’une mutation linguistique. On peut puiser de multiples exemples dans l’histoire socioculturelle du Maghreb. La venue des tribus hilaliennes en Afrique du Nord sous les Almohades a eu pour conséquence de féconder la musique, cela avait donné naissance à la poésie chantée dite «Chi’r al-Malhoun» laquelle devait sceller la communion arabo-berbère. Quand vint le moment de conquérir l’Andalousie, un grand mixage se produit alors dans cette rencontre entre trois cultures, l’ibérique, l’amazighe et l’arabe qui finit par accoucher de la musique andalouse. De même, l’afflux des Noirs de l’Afrique subsaharienne a introduit le gnawi alors que tout près de nous, plus exactement au 19e siècle, l’exode de Kabyles vers la Casbah d’Alger a eu pour effet de faire éclore la musique châabie. Mais tous ces genres musicaux s’appuient sur un substrat commun ou du moins entretiennent avec lui des liens étroits. Ce substrat c’est le « malhoun » étymologiquement « mélodique » qualificatif qui s’applique au « poème ». Déclamé en arabe dialectal et en amazigh (surtout au Maroc) selon le principe de l’art poétique, les qacidate (poèmes) sont devenues avec le temps une sorte de koïnè musicale maghrébine. Cette koïnè se déploie sous formes diverses. Malhoun et châabie en Algérie, Malouf en Tunisie et « qacida du ghazal » au Maroc.
Le rôle du poète dans l'ancienne société marocaine est considérable. Il est avant tout le chroniqueur, l"historien" de sa tribu. Il ne chante pas seulement ses amours et ses déboires propres, mais aussi et surtout les événements vécus au sein de sa tribu. Au cours d'une joute entre clans rivaux, c'est à lui que l'on fait appel pour prendre la défense des siens. Respecté et vénéré à l'égal d'un saint, sa parole est écoutée, car il possède la sagesse et le secret des mots qui vont droit au cœur.
Le poème écrit en zajal (زجل) est enrichi de mélodies populaires, cette création va donner naissance au Malhoun. La chanson populaire arabe au Maroc emprunte ses modes à la musique andalouse. Il est connu depuis l'époque almohade où de nombreuses productions marocaines et andalouses du zajal ont vu le jour. L'art Almohade marquait l'apogée artistique du Maghreb. Il se caractérise par une épuration des formes traduisant la rigueur religieuse. C'est l'affirmation des formes géométriques. Les bâtiments sont massifs mais allégés par des décors. Le tout donne un effet de majesté. Ils sont les les bâtisseurs de villes comme Ribat el Fath (Rabat) et cette époque constitue un point fort de l'union culturelle entre Maghreb et Andalousie. A une grande rigueur religieuse correspond également un déploiement des sciences. Les élites s'ouvraient à la culture andalouse (poésie, médecine, philosophie...) avant de venir régner dans la capitale Marrakech. La différence entre culture citadine des élites et culture plus frustre des tribus s'affirmait de plus en plus.
La forme première du malhoun était véhiculée par les maddahin, s'accommodait en effet très bien avec la mission de diffusion d'information que s'étaient assigné les premiers Almohades.
Les qacidate véhiculent une mémoire, une histoire. Le melhoun n’exprime pas seulement des sentiments, il est la mémoire qui a fait l’histoire de l’Algérie et du Maghreb. Contrairement à ce qu’on pense, le melhoun n’est pas exclusivement oral, il a donné lieu à une profusion de manuscrits qui avaient circulé sous forme de registres. Ces documents dénommés diwans, véritables œuvres d’art étaient joliment calligraphiés. C’est grâce à l’écrit qu’on avait pris connaissance des zajals du cheikh andalou Bengouzman. Déjà Léon l’Africain qui a vécu au XVIe siècle notait dans son livre «Description de l’Afrique» que les poètes prenaient part à des compétitions où il donnaient libre cours à l’expression de leur art. En attendant qu’on écrive une histoire du Malhoun, il faut faire observer que les Marocains revendiquent la paternité de cet art. Il serait originaire du Tafilalet et a connu une mutation après avoir été mis en contact de la musique andalouse et des chants populaires. Le genre a vu le jour à l’époque des Almohades, en 1 147 environ et s’est développé sous la dynastie des Saâdiens. A cette époque il avait reçu sa codification en mesures dites « Surûf », l’équivalent des « taf’ilât » de la poésie classique. Le Cheikh Abd El-Aziz El-Maghraoui en serait le précurseur, il avait désigné le pied métrique sous le terme de « Dân ». Il eut des disciples dont le plus marquant est le poète El-Masmûdi, qui avait opté pour le mot « Mîli » pour désigner le pied. Si le Tafilalet en fut le berceau, le genre ne s’est pas moins propagé dans les villes à l’image de Marrakech, Meknès, Fès, Taroudant, Asfi, Salé et Rabat. Quoi qu’il en soit, les maîtres du chaabi algérien ont puisé pour la plupart dans les textes marocains auxquels ils ont su donner une nouvelle vigueur en recourant à une interprétation originale aux couleurs du pays.
Le malhoun à Essaouira a connu des jours fastes au XIXème siècle avec son représentant le plus illustre Mohamed Ben Sghir. Selon le chercheur illustre du patrimoine du malhoun. Ahmed Souhoum, Mohamed Ben Sghir représente un chaînon fort du malhoun et de la tradition poétique souiri de ce siècle. Ce maître était un adepte de la confrérie des aissaoua pour laquelle il a composé plusieurs chants religieux (adkar). Sa poésie d'une extrême finess épousait la culture de son époque. Néanmoins la richesse de ses textes et de son répertoire lui on valu une grande notoriété dans tout le Maroc et ce jusqu'à nos jours. Parmi ses célèbres qaçaïd on peut citer en particulier Lafjar (l'aube); achamâa (la bougie), al falaka (la punition), al kasbah et al warchane (la colombe). Al Warchane est un véritable hymne à l'amour de l'auteur pour sa ville natale, poésie dans laquelle la colombe d'Essaouira effectue une longue périgrinatio, imaginaire jusqu'à Tlemcen en Algérie après avoir rendu visite aux sept saints des régraga dans l'arrière pays des chiadmas pour receuillir leur bénédiction.
Colombe, va chez les fils d'Essaouira
qui résident à Tlemcen.
Porte leur le salut d'Allah
prie pour leur gloire et leur lumière,
Pour qu'il nous reviennent comme ils nous ont quittés.
De la porte du lion tu sortiras colombe,
tu demandera protection à Sidi Mogdoul, seigneur du port.
Sa nouvelle est parvenue jusqu'à Istambul.
Sois prudente et éveillée.
Dépasse les amas de pierre au dela de la grande colline,
Et touche de tes ailes moula dourain (saint de Regraga),
Gloire de notre pays.
Mohamed Bassis (né en 1927), fut également un authentique interprète de malhoun pendant plusieurs décennies.
Le doyen de la musique Melhoun, Haj Houcine Toulali qui avait créé une école de Malhoun qui a contribué à la préservation de cette expression musicale typique reflétant les différents aspects de la vie quotidienne.
Le Malhoun est un art qui vit encore grâce à la jeune generation de voix comme Asmae Lazrak, Majda El Yehyaoui, entre autres, les villes réputées pour le représenter sont Meknès, Tafilalt, Taroudant, Marrakech, Fès.
Détail
De nombreux termes génériques ont été utilisés pour désigner le Melhoun. On trouve : « Qarîdh », la « langue », les « paroles », le « nidhâm », la « poésie », l'« âme », la « science du génie » et enfin le Melhoun. On pense que ce dernier terme dérive de la racine « lahn », qui signifie mélodie ; malhûn désignerait donc des paroles dont la mélodie serait déjà prête ; le poète n'ayant plus qu'à composer selon des mesures pré-établies. Les paroles se chanteraient donc sans avoir besoin d'être mises en musique, celle-ci existant préalablement à celles-là.
Les femmes et le malhoun
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Touria Hadraoui
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Sanaa Marahati
Les femmes ont toujours été présentes et influentes durant les différentes étapes historiques du Malhoun. Elles ont fortement contribué à son édification et sa préservation (citons à titre d'exemple la grande Cheikha Brika de Fès). Elles étaient poètes, musiciennes et chanteuses, mais faute de mœurs sociales, de coutumes et de médiatisation, elles n'ont pas eu la même chance que les hommes devant cet art musical. Les femmes s'en sont également emparées, l'adaptant avec bonheur à la tessiture de leurs voix. Pensons à la jeune génération de voix comme Asmae Lazrak, Touria Hadraoui, Majda El Yehyaoui, (qui a dépoussiéré l'image vieillotte du style musical).
Originaire de Casablanca, Touria Hadraoui est une des pionnière à interpréter ce genre poético-musical Elle avait mené une carrière d'enseignante, journaliste et écrivain. Cette femme de culture marocaine a consacré sa vie universitaire aux grands philosophes arabes, ma sa première découverte qui l'a marqué fut d'écouter, à l'âge de 9 ans, la voix d'Oum Kalthoum, car elle ne comprenait pas tout ce qu'elle chantait, mais elle lui a ouvert les oreilles, le cœur et l'esprit. Elle a enregistré deux albums "Chemâa" en 1991 et "Arabesques sur rythmes africains" en 2003 où le chant andalou rencontre les rythmes de la mère terre. Elle est également l'auteur d'un roman autobiographique "Une enfance marocaine" paru en 1998 aux éditions Fennec.
Laila Lamrini est une artiste marocaine qui a grandi à Meknès, bercée par la beauté de la musique appartenant au patrimoine des musiques traditionnelles et particulièrement celle du malhoun qu'elle affectionne et chante depuis son enfance. Elle a fait bon usage de ses paroles et de ses musiques, donnant naissance à un chant sophistiqué et élégant. Aujourd'hui, elle figure parmi les meilleures voix féminines représentant ce style qu'elle décrit comme la forme la plus noble au niveau artistique et littéraire, qui est également un symbole d'identité culturelle purement marocain.

Sanaa Marahati (en arabe: سناء مرحتي) est un brillante interprète de malhoun marocaine. Née en 1983, elle détient un master socio-linguistique et réalise un mémoire de fin d'étude sur "la perception de l'image de la femme dans la poésie melhoun". Sanaa Marahati a marqué sa présence aussi sur les chaines nationales marocaines à travers deux programmes télévisés dédiés au Melhoun (diffusés pendant le mois de Ramadan. Elle a aussi diverses parutions dans des soirées télévisées ( naghma w atay ;chada alhane ;massar ...). Elle publie 5 albums qui obtiennent énormément de succès auprès du label Fassiphone.
La naissance du malhoun
La naissance de ce patrimoine authentique est à chercher dans le Sud marocain, plus exactement dans la région du Tafilalet, à l'époque des Almohades, autour de l'année 1147. Mais il n'a commencé à se développer qu'à partir de l'ère des Saadiens, lorsque des artistes novateurs en ont examiné les mesures et l'on codifié en différents « Surûf », qui sont au Melhoun ce que les taf'ilât sont à la poésie classique. On considère que le premier à s'être consacré à cet art fut le Cheikh Abd el-Aziz el-Maghraoui, qui a désigné le pied métrique sous le terme de « Dân », il est devenu le modèle suivi par les poètes marocains dans leurs compositions. Est apparu après lui le poète el-Masmûdi, qui a lui adopté le mot « Mîli » pour désigner le pied, ce terme ne voulait absolument rien dire mais est tout de même devenu lui aussi un modèle.
Le phare d'où brillait cet art de mille feux étant le Tafilalet, resté jusqu'à présent son berceau le plus prolifique, il n'en reste pas moins que bien d'autres villes ont excellé dans ce genre musical, et n'en sont pas moins devenues aussi importantes que le Tafilalet ; ce sont Marrakech, Meknès, Fès, Taroudant, Asfi (Safi), Salé et Rabat.
Les modes
L'art du Melhoun se joue selon dix modes, nommés :
- Le Bayati de la musique arabe classique, que l'on nomme Maya pour le Melhoun,
- Le grand Hejaz,
- Le Sika,
- Le Araq el-Ajem,
- L'Ispahan,
- Le Hejaz oriental,
- Le Razd andalou,
- Le Raml el-Maya taziriya
- Le Bughiat Raml el-Maya.
Les rythmes sont au nombre de trois :
- Le Haddari : 4 / 2
- Le Dridka : 8 / 6
- Le Gbahi : 8 / 5
Cette musique habitait le coeur de personne, des amateurs et des créateurs, issues des catégories sociales les plus diverses. Sous l'impulsion des musiciens professionnels et de l'élite cultivée, il a continué à jaillir du plus profond de la société marocaine. L'art du Melhoun est la voix qui a exprimé les préoccupations des marocains, leurs croyances et leurs émotions. Il représente la sédimentation de la mémoire marocaine à travers les âges.
Il est relié à la vie quotidienne des marocains dans leurs heurs et malheurs, il est considéré comme l'auxiliaire artistique et culturel le plus important de la civilisation marocaine. Ses poèmes abordent tous les thèmes : spirituels, intellectuels et autres, sous des formes artistiques de toute beauté, alliant la splendeur des images à celle des mots.
Parmi les thèmes abordés par le Melhoun, on trouve les « Tawassoulât ». Dans les recueils, ce sont des poèmes mystiques, composés par de grands hommes du soufisme tel le théologien Laamiri et Sidi Abdelkader el Alami (que les connaisseurs et férus de Melhoun appellent "Le Philosophe du Melhoun", le Sage), garant de Fès, qui est considéré comme un des plus grands mystiques du Maroc. Il a composé un ensemble de pièces poétiques évoquant le désir de se fondre dans l'essence divine et des poèmes à la louange de l'Elu, que le salut et la bénédiction de Dieu soient sur lui. Ces poèmes, aux images les plus belles qui soient, ont touché la conscience de tous les arabes car ils ont été composés en arabe classique dans un style non moins beau que celui d'un Ibn Faredh ou d'un autre de ses comparses puis mises en musique. Citons la Qasida "Talt B Sidi had Riba o twahcht beaâ hob réhro la ts'hlah" . Sidi Abdelkader El Alami est enterré à Meknès.
Le terme « Tawassul » désigne les poèmes d'invocation dans lesquels l'adorateur se confie avec ferveur à son adoré. C'est un thème poétique qui comprend les poèmes de louange, d'action de grâce, d'invocation et de gratitude envers Dieu, exalté soit-il. Apparaissent également des poèmes de remords, de retour à Dieu et d'imploration du pardon divin, ainsi que toutes sortes d'autres thèmes religieux dans lesquels l'artiste se retourne sur sa vie, pleure ses erreurs et ses faux pas.
- La louange : Elle peut être religieuse ou mondaine. La première s'adresse au Prophète, à sa noble famille, à ses compagnons, aux saints, mystiques et hommes de Dieu. Quant à la seconde, elle s'adresse aux rois du Maroc et aux grands de ce monde qu'ils soient hommes de religion, nobles, bienfaiteurs ou savants.
- Les recommandations : Ce sont des poèmes d'exhortation et des poèmes didactiques, les thèmes qu'ils abordent se recoupent parfois avec ceux des « Tawassulât » ; les plus belles pièces étant celles dans lesquelles l'artiste interpelle les gens en général, ou bien une personne particulière à travers laquelle il s'adresse en fait à lui-même.
- Les « printaniers » : Ce sont de splendides tableaux de la nature, décrivant le plus souvent la luxuriance du printemps. Les pièces renferment beaucoup de noms désignant toutes sortes d'arbres, de plantes, de fleurs et d'oiseaux. Mais si le thème mis en exergue dans ce genre est la description de la nature au faîte de sa magnificence, de sa splendeur, ornée de sa plus belle parure, les poètes qui l'ont traité en ont rarement pour autant négligé l'éclat de la beauté féminine, qu'ils ont rêvé dans des pièces galantes appelées « Ochaqi ».
- Le « ochaqi » : C'est la poésie amoureuse du Melhoun. Les poètes populaires y ont excellé, décrivant les différents états émotifs engendrés par l'éloignement de l'être aimé, sa rencontre, la séparation, le rendez-vous, les soupirs, les pleurs et la joie.
- Le « saqi » :Ce sont des poèmes bacchiques qui célèbrent la bonne compagnie, les réunions entre amis, la gaieté suscitée par le vin. Le poète a ici innové et laissé libre cours à son imagination. On trouve dans ce genre des images ravissantes, représentant superbement le rapprochement de la coupe aux lèvres. Evoquant le fait de boire du vin avec vanité, blâme ou bien encore s'en détournant malgré son attrait. Il y a aussi des poèmes dans lesquels le vin n'apparaît que comme symbole mystique, sans qu'il y ait absolument aucun rapport avec la boisson que l'on nomme « vin ».
- La thrène (el-Rithâ') : Appelée aussi « Azou », le poète y exprime sa douleur, consécutive à la perte d'un être cher, d'un proche, d'un chef patriote, d'un homme de culture, d'un artiste ou d'un héros.
- La satire (Hajou) : Elle est lancée pour attaquer un traître, un imposteur, un harpagon, mais il constitue aussi un moyen de flétrir les parasites et les plagieurs en règle générale, pour faire apparaître leur faiblesse et leur vice.
- La « Tarjama » : Humour et moquerie, pouvant parfois dévier vers une forme de racisme. Le poète s'y attaque à la charlatanerie, aux faux devins, à la cupidité et à tous les défauts et pratiques détestables qui laissaient perplexe l'élite cultivée.
Manifestations de malhoun
- Festival de l'art du Malhoun de Fès, organisé annuellement par la commune urbaine de Fès, il vise de manière générale à préserver cet art sublime, en rendant hommage aux figures de proue ayant contribué à la pérennité du Malhoun et assuré sa transmission aux jeunes générations. L'édition 2008 qui a coïncidé avec les festivités marquant le 1200ème anniversaire de la fondation de la capitale spirituelle du Maroc a connu une programmation riche et diversifiée incluant des conférences thématiques et des concerts de groupes de renom venant de différentes régions du Royaume. Cette édition a été marquée par la présentation d'une œuvre académique de Abbas Al Jirari intitulée "le projet scientifique de l'Académie du Royaume du Maroc dans le domaine de l'art du Malhoun" et d'un recueil poétique de sidi Abdelaziz El Maghraoui.
- Festival Sijilmassa du Melhoun : En 2007, un hommage a été rendu à l'artiste Abderrahmane Selsouli.
- Les Printemps du Malhoun de Meknès inscrit sa démarche dans l'héritage poétique et musical des maîtres précurseurs de cet art à Meknès. Les Printemps du Malhoun de Meknès ont lieu courant juin.
- Festival du malhoun d'Essaouira (Festival « Warchane l'Malhoun à Essaouira »)
Thami Lamdaghri ou Mdaghri (mort en 1856) fut un célèbre compositeur marocain de Malhoun
A partir du malhoun aussi appelé griha, sont venus se greffer "les textes de la sagesse" de la tarika des Aïssawas, Hmadcha, Samaâ et plusieurs arts qui ont découlé de ce genre poétique. Bien que conçu dans un dialecte très raffiné(arabe classique un peu dialectisée), les thèmes abordés dans le malhoun sont universels car ils sont les thèmes porteurs de l'existence du genre humain et bien qu'il n'est pas resté spécifiquement marocain, il est devenu la mémoire vivante des évènements qui ont marqués notre monde, l'histoire universelle des humains, mais aussi les choses plus cachées du monde de la matière. Il parle de thèmes très actuels comme le racisme, de politique, de l'attention portée aux parents, parle de religion. Le malhoun parle des temps anciens des Arabes et des temps modernes. Le malhoun joue dans ce sens, un rôle pédagogique très important. La première école de malhoun est fondée au début du XVIe siècle à Meknès où il est encore enseigné comme discipline.
Saïd El Meftahi est l'une des figures de proue et surtout une voix reconnue du Malhoun et du tarab. Installé depuis quelques années en France, il se pose en observateur et chercheur de ce qui se passe d'un côté et de l'autre des rives de la Méditerranée.
Ahmed Amine Dellaï (né en 1954 à Oran) est un chercheur en poésie populaire et le spécialiste du melhoun. Ses publications sont une référence en la matière. Ce sociologue a travaillé sans relâche sur le Melhoun et a accompli des traductions remarquables de poèmes anciens qui est son thème de prédilection et l'objet de sa passion.
El Hadj Omar Bouri, poète du malhoun et mélomane à Taroudant
El Hadj Omar Bouri (né en 1940 à Taroudant) est un brillant homme de culture marocain vivant et travaillant à Taroudant. Il est complètement investi dans le travail de l'agriculture et de la boucherie. C'est lui qui approvisionne les étals de la ville. Mais c'est aussi et surtout un Poète du Melhoun qui figure parmi les plus connus dans ce genre. L'homme encourage tous les jeunes de la ville à s'intéresser à tous les registres musicaux, à la musique en général.
Mostefa Ben Brahim connu également sous le nom de Safa fut la gloire de la poésie populaire algérienne dite "melhoun". Son œuvre particulièrement inspirée retentira sur la chanson oranaise telle qu'elle est encore connue de nos jours. Ses textes vont donner du nerf à la poésie bédouine. Ce brillant poète et imam est formé dans la Zaouïa d’Al Mahaja (école coranique), s’imprégna des plus grands poètes du melhoun de la région d'Oran et lors de son exil au Maroc. Dans cet exil, il est influencé par les maîtres et les précurseurs du melhoun, tels le plus ancien poète algérien de melhoun, Lakhdar Ben Khlouf (XVIème Siècle), Ben Msyeb (décédé en 1768, à Tlemcen) et Cheikh Ben Guenoun de Mascara. Sa poésie est chantée par des grands chanteurs Oranais comme, Cheikh Hamada, Abdelkader El Khaldi, Djilali Ain Tedles, Ourad Boumediene, Cheikh El Mamachi, Cheikh Hachmi Bensmir, Cheikh Madani, Ahmed Wahby, Blaoui M'Hamed El Houari, Ahmed Saber, M’Hamed Benzerga, Cheikh Fethi, Cheb Khaled, Cheb Hasni, Cheb Mami, Rachid Taha, Mohamed Mazouzi, Houari Benchenet, Baroudi Belkhada, ainsi que d’autres grands chanteurs en Algérie et à l'étranger.
Association Mohamed el Fassi tarab el malhoun
Hassan Slimani premier marocain qui compose et chante le Melhoun en Français
Articles connexes
Sources
- L'art du Melhoun, son histoire, ses richesses par Saïd El Meftahi
- Il était une fois le malhoun par Ahmed Aydoun (Musicologue)
Malhun (or Milhûn, in Arabic الملحون) meaning the melodic poem is a Moroccan music that borrows its modes from the Andalusian music. It is a kind of urban, sung poetry that comes from the exclusively masculine working-class milieu of craftsmen's guilds.
The melhun, originally a pure literary creation, emerged as a poetic art today known in Morocco under the name of Qasida (meaning poem) (in Arabic القصيدة) or zajal (in Arabic الزجل). Combined with music, it quickly spread across the country where it acquired fame particularly among artisans. The qassida (laqsida in Moroccan arabic) of the malhun is based on two essential elements: the overtures preceding it and the parts of which it is composed. aqsâm (in Arabic الاقسام) verses sung solo interrupted by the harba refrain (meaning launch) (in Arabic الحربة). Harba, the origin of which goes back to the 16th century, is a refrain taken up between the verses by the sheddâda (group of singers and instrumentalist-singers)(in Arabic الشداشة). Another refrain called dridka in Arabic الدريدكة) is a simplified form of the harba, taking off from an accelerated rhythm to announce the end of a qassida.
The qassida however preserved the division of the text in stanzas as in the Andalusian song: the verse (ghson meaning branch) can include from eight to sixteen verses, a short refrain or harba offers an alternation which makes it possible to break the monotony of the musical discourse of the Malhoun song. This gave rise to the sûruf, subsidiary procedures employed by singers to produce an even greater effect on the audience and above all to correct the rhythm. Abdelaziz al-Maghrawi (16th 17th centuries) created from dân, a word that has no meaning, verses which were used as the basis for versewriting by Moroccan folk poets. (e.g. Dân dâni yâ dâni dân dân yâ dân).